En parcourant les statistiques de mon blog, il s’est avéré que “je suis maman” restait l’article le plus apprécié à ce-jour. Je dois dire que c’est aussi un de mes préférés. Même s’il ne traite pas d’un sujet lié à l’alimentation, c’est un article écrit avec le cœur et c’est sûrement ce qui l’a propulsé en haut des lectures. En tout cas j’aime bien le penser. C’est mieux que de me dire que je devrais peut-être arrêter d’écrire au sujet de l’alimentation, ce qui impliquerait que je doive trouver un autre nom de domaine pour ce blog et revoir le concept en entier. Trop de travail ! 

J’étais la maman de Milan quand j’ai écrit ce premier article sur mon expérience de la maternité. Aujourd’hui je suis toujours la maman de Milan mais aussi celle de Mahé, cela implique que je suis régulièrement prise à partie pour savoir à qui appartient le bateau légo et qui a poussé qui en premier. 

À l’heure où j’écris ces lignes, je n’ai jamais été autant fatiguée de toute ma vie, les jours où je me lave les cheveux font partie des meilleurs de ma semaine et le panier à lessive se remplit au fur et à mesure que je le vide, de manière continue. Ces derniers mois, j’ai nagé à contre courant contre la vie, j’ai passé des heures à nettoyer du riz ou plein d’autres denrées comestibles sous la table, à chercher la télécommande jusqu’à que je comprenne qu’elle était sûrement dans la poubelle, à chercher la chaussette manquante qui n’était pas revenue avec le reste du linge propre, à partager mon lit avec deux étoiles de mer et à essayer de boire un thé chaud avant qu’il ne soit froid. Ces derniers mois, j’ai dû accepter l’incertitude de pouvoir honorer mes journées de travail à cause de tous les virus qui semblent avoir pris racine dans l’organisme de mes enfants et je me suis fait vomir dessus, deux fois. J’ai dû aller refaire un biberon parce qu’il n’était pas assez tiède (oui, pas assez tiède, à moi de deviner s’il faut rajouter de l’eau chaude ou de l’eau froide, une chance sur deux). Je me suis aussi retrouvée à recoller une galette de riz avec ma salive parce qu’apparement, les galettes de riz cassées ça ne se mange pas. J’ai dû lire un tas d’histoires en m’imprégnant bien des personnages, surtout quand il s’agit d’un éléphant à 3 pattes qui court vite. J’ai dû consoler un tas de vrais bobos et un tas de bobos imaginaires et j’ai dû recourir à des stratagèmes hyper élaborés pour faire des trucs très banals, genre brosser des dents. Mais le pire dans tout ça, c’est quand même la fois où j’ai dû aller nourrir les canards par -6°C pour qu’en arrivant, mon fils de 3 ans me dise que finalement il préférait qu’on rentre parce que ce n’est pas bien de donner du pain aux canards. 

Et puis il y a toutes ces frustrations et la nostalgie du temps d’avant. Celui où je pouvais dormir le week-end, faire pipi la porte fermée, manger tranquille au resto, ne pas devoir organiser 3 solutions de garde pour aller faire un peu de sport, prévoir le voyage qui me fait rêver et non pas celui qui semble pratique avec des enfants, boire un verre avec mes copines sans mettre mon téléphone sur mode “je suis sourde” au cas où la nounou m’appellerait, me laver les cheveux quand je veux, avoir la place que je veux dans mon lit, pouvoir être malade sans qu’on me dérange, louer un quad en vacances et non pas un bus avec deux sièges auto et un grand coffre, ne pas recevoir de conseils éducatifs de personnes à qui j’en ai pas demandés et ne pas avoir l’impression de mener 4 vies en même temps. 

Et dire que je me trouvais fatiguée ! Oui, je vous jure ! Chaque vendredi soir quand on me proposait de sortir boire un verre et que je n’avais qu’à dire oui et mettre un peu de mascara sans que personne ne soit assis sur mes pieds en insistant pour que je lui en mette aussi. 

Quand je repense à toutes ces fois où j’ai dit non parce que c’était la fin de la semaine et que j’étais “claquée”. LOL.

Ces derniers mois, il m’est arrivé de me demander si je regrettais d’être devenue maman, si ce n’était pas trop pour moi. Souvent à la fin d’une journée particulièrement éprouvante ou quand je devais aller faire de la balançoire avec 39°C de fièvre, ce questionnement me traversait l’esprit, non pas sans culpabilité. Il m’arrivait alors d’imaginer quelques secondes ma vie sans eux, une vie que j’avais particulièrement appréciée à l’époque. Une vie où je dors le samedi matin, où j’ai tout le temps les cheveux qui sentent bon et un appartement bien rangé.

Mais aussi une vie sans sauter sur les lignes jaunes des passages piéton pour éviter les crocodiles, sans petits pieds froids qui se collent aux miens le matin, sans qu’on m’apporte un faux thé à la tomate et aux champignons quand je suis malade, sans petits bras qui m’enlacent, sans petites mains qui tiennent la mienne pour sauter dans les flaques, sans personne qui me suive à lessive en me racontant un tas d’histoires, sans qu’on me cueille 3 fleurs fanées trouvées sur le chemin de la garderie, sans qu’on me fasse faire du toboggan, sans qu’on me demande ce que mangent les rhinocéros ou les kangourous, sans qu’on me fasse des glaces en pâte à modeler et que je doive les goûter pour de vrai, sans qu’on me dise “tu sais maman, t’es jolie”, sans les voir éclater de rire, découvrir le mode et s’émerveiller des petites choses de la vie qu’on a oubliées en grandissant. 

C’est vrai que ma vie d’avant me manque parfois et que j’y reviendrais bien quelques jours pour me reposer un peu et aller boire un verre le vendredi soir. Mais je crois qu’au fond, je serais vite de retour dans ma vie de maman. J’ai jamais ressenti autant d’amour que celui que j’ai pour eux et je ne me suis jamais sentie autant fière de rien dans la vie. J’aime le fait qu’ils me ramènent au moment présent pour admirer un nuage qui a la forme d’un poussin, qu’ils me fassent (ré-) apprendre le nom des dinosaures et toute la chaîne alimentaire. J’aime les voir apprendre, découvrir le monde et l’idée qu’il s’en font. J’aime qu’ils me ramènent aux choses simples de la vie, celles qui comptent vraiment. 

Il n’y a pas si longtemps, je suis allée visiter mon grand-papa et dans un éclat de lucidité, il m’a rappelé que la vie passait vite. Il m’a dit de ne pas oublier d’accorder de l’importance aux choses qui ont en vraiment et j’avais envie de partager ces mots plein de bon sens avec tous les parents du monde qui se sentent parfois submergés par la fatigue et le manque de temps pour soi. 

Je sais qu’un jour, tout ça sera derrière moi, que j’aurai le temps de dormir, de boire des cafés tranquille, que mon appartement sera rangé et que je pourrai à nouveau envisager d’acheter des choses fragiles qui coûtent cher. J’espère aussi que ce jour n’arrivera pas trop vite et que je saurai apprécier chaque journée qui m’est donnée avec eux. Parce qu’au bout du voyage, ce n’est pas d’avoir un appartement rangé et des choses qui coûtent chers qui comptent, ce sont les souvenirs plantés dans le cœur de nos enfants et nos petits enfants, ce sont les chagrins consolés, la sécurité donnée, les éclats de rire, les petites coccinelles qui s’envolent et les nuages en forme de poussin.